Dobbs - Scénariste




Janvier 2012










Bonjour Dobbs, que s’est-il passé dans votre vie professionnelle depuis notre dernière interview (août 2010) ?
Bonjour à vous.
Alors je suis toujours formateur en histoire du cinéma pour une école d’effets spéciaux sur Montpellier (on ne m’a pas encore viré), et j’y prends un plaisir non dissimulé (la torture d’étudiants est un exercice délicat et un art subtil hehehe). Quant aux BD que j’ai pu écrire, plusieurs sont sorties dans l’intervalle comme le tome 1 d’Allan Quatermain en septembre 2010 chez Soleil, un collectif écolo (Brume) sorti en janvier 2011 chez Ankama CFSL, et puis aussi le tome 1 d’Alamo en avril qui a suivi.


Vous êtes le scénariste de plusieurs titres parus dans la collection 1800. Avec des sujets aussi différents, comment passe-t-on d’un univers à l’autre ?
L’intérêt de cette collection pour un ancien rôliste comme moi est de traiter une époque remarquable, qu’elle soit romantique, historique, gothique, fantastique etc… Les sujets sont différents et le réalisme qu’il exploite l’est également, mais cette temporalité commune laisse la place à un univers qui est cohérent pour moi. J’utilise l’Histoire et les faits réels pour m’en détacher ensuite afin de rendre hommage à la littérature et de placer certains personnages récurrents qui font et qui feront des liens pour un deuxième et troisième niveau(x) de lecture.
Cloisonner mon travail entre les différentes séries est aussi un moyen technique d’avancer sereinement : lorsque j’écris les dialogues pour un projet, je peux en simultané travailler à la structure d’un séquencier et aux pistes multiples de concepts à venir. Il m’est difficile toutefois de travailler à une même tâche sur plusieurs séries, comme faire le découpage de deux albums en même temps. Fragmenter les tâches, et équilibrer écriture et enseignement, voilà comment je ne me « noie pas » en plus de mes fonctions de formateur…



Votre actualité est la sortie du tome 2 d’Allan Quatermain, pourriez-vous nous en dire plus sur cette série ?
Comme je l’ai dit dans la note d’intention du tome 1, le récit littéraire d’aventures de type « Lost World » a permis aux lecteurs de tous les pays de découvrir avec émerveillement des civilisations perdues aux coutumes étranges. L’auteur original de ce roman, H. Rider Haggard, a été l’un des premiers à utiliser l’exploration de régions mystérieuses sur le sol africain pour présenter une solide histoire d’amitié en plein colonialisme, en essayant de faire aussi bien qu’un Stevenson, roi du genre aventureux…
Avec DimD, nous nous sommes attachés à faire ce portrait d’hommes forts (blancs et noirs) sans le politiquement correct de notre époque, pour coller au mieux à l’esprit de l’ère victorienne : ceci afin de rendre hommage à ce livre, quelque peu précurseur d’un Indiana Jones, en ne faisant que quelques retouches discrètes au niveau de la redondance de plusieurs séquences de chasses africaines…


Comment est née l’idée du scénario ?
Suite à la proposition que m’a faite Jean-Luc Istin pour croiser Hyde et Frankenstein au début de la collection 1800 (et je l’en remercie encore), je lui ai tendu la perche sur plusieurs idées que j’avais depuis longtemps : Alamo et Quatermain sont très rapidement venus sur la table des négociations (pour des raisons différentes).
Alamo pour retravailler à ma sauce les événements et les personnages texans si bien représentés comme icônes  héroïques dans les différentes médias, Quatermain parce que j’avais toujours en tête cette histoire d’épreuves que devaient surmonter des individus forts qui refusent parfois de regarder en face l’amitié qui les lie. Et puis le roman de Haggard a tellement influencé des auteurs tels que Tolkien pour son Seigneur des Anneaux, qu’il était logique que je rende hommage à ce livre qui a marqué mon adolescence au même titre qu’un Frankenstein et autres Dracula…



Allan Quatermain, Mister Hyde, Frankenstein… comment fait-on pour reprendre des personnages légendaires sans « dénaturer » les originaux ?
Tous correspondent à des idées et concepts forts à la source. La dualité, l’ambigüité, la folie, l’ambition sont des moteurs remarquables pour des personnages qui deviennent des gens qui souffrent ou des antihéros… C’est toujours plus intéressant de se focaliser sur de telles créations…
Respecter leur nature profonde et les adapter à une solution personnelle, c’était ça le challenge initial. C’était plus complique pour Hyde et Frankenstein dans la mesure où notre mini-série pouvait s’intercaler entre la fin du roman de Shelley et le début de celui de Stevenson avec un certain refus de la fin de Frankenstein ou le Prométhée moderne. Pour Quatermain, je me suis positionné dans un objectif de pure adaptation en mettant la fidélité au dessus de tout. Le Quatermain de notre série avec DimD au dessin et à la couleur est vraiment lié à celui de Haggard. Ce n’est pas comme les versions hollywoodiennes qui ont pris trop de libertés avec le matériel d’origine, et ont travesti/dénaturé le personnage initial. C’est un parti pris, et nous l’avons respecté jusqu’au bout…


Un petit mot sur le tome 2 d’Alamo, date de sortie, un petit scoop ?

Celui-ci sortira avant l’été 2012, comme les premiers tomes de deux autres séries : l’une nommée Scotland Yard avec Stéphane Perger au dessin et à la couleur directe (pour 1800 également), et l’autre Loki avec Benjamin Loirat et qui sera son premier album (avec mon compère Simon Quemener à la couleur). Bon, j’espère qu’il n’y aura aucun retard, ce début d’année est plutôt chargé…


Quelles ont été vos influences et vos sources d’inspiration pour cette série ?
Le premier élément important était de trouver un angle original pour traiter un événement dont tout le monde connait l’issu. De plus, le film de John Wayne et beaucoup d’autres histoires de Disney par exemple ont fait de Davy Crockett et de ses camarades des figures héroïques quasi mythiques du fort Alamo… Dur de faire quelque chose de critique après ça…
L’idée de la mini-série est de suivre les actions du seul Français du fort, un mercenaire venu s’enrichir au Texas, et qui s’avère être un personnage qui a réellement existé. Ce dernier fût connu comme le « lâche d’Alamo », celui qui a survécu parce qu’il a fui la nuit de l’assaut final… Quoi de plus excitant que ce détail ? J’en ai donc fait le personnage principal, un tueur qui œuvre pour un commanditaire très ambitieux (et désireux de faire place nette pour la réussite de son plan politique visant l’indépendance du Texas, territoire encore mexicain à cette heure…).
Vous savez donc que le fort chutera, mais pas de quelle façon, et qui mourra et surtout comment… Pour cela, j’ai traité un nombre important d’archives militaires et surtout des témoignages de l’époque afin de distiller de très nombreux faits et anecdotes dans l’aventure. Des éléments qui permettent de rendre très vivant ce double tome et de mener le lecteur jusqu’à cette fin inexorable des premiers jours de mars 1836…

Quels sont vos projets ?
Pour le moment, je suis sur l’écriture du tome 2 de Loki, le développement de plusieurs projets pour Soleil, et sur un one-shot pour Ankama dont je parlerai certainement bientôt, dés que les choses seront plus officielles…


Que pensez-vous du livre numérique et comment pensez-vous que la bd puisse évoluer avec ce média ?
Les gens et la technologie sont prêts désormais pour permettre l’épanouissement d’une certaine BD numérique. Elle ne remplacera pas à mon avis la BD classique dans son rapport au livre, mais donnera des possibilités complémentaires (bonus, son, making of dynamique etc). L’époque de l’échec du BDVD est donc bien révolue, et une nouvelle ère s’offre à nous avec tout de même de très grosses incertitudes. Les éditeurs sont un peu dans le flou (comme les auteurs), et je ne pense pas que pour le moment l’évolution soit radicale.
Les motion comics de Marvel sont anecdotiques… je ne sais pas combien de vente d’albums numériques se font à l’heure actuelle en téléchargement sur les plateformes smartphones et autres. On est au cœur du débat sans réelle vision du futur à ce niveau là…


La dernière fois, votre mot de la fin était « Guacamole », On s’attend à tout pour cette fois-ci,  mais même pas peur … On vous laisse donc le mot de la fin.
Hum, « Supercalifragilisticexpialidocious »…
Oui, il ne faut pas me chercher ;)

 




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