Résumé éditeur :
Vichy,1943. Aux portes de la ville, une série de crimes frappe la communauté paysanne de la montagne bourbonnaise. Des vaches sont mutilées, des fillettes retrouvées mortes et amputées. Sanglier sauvage ? Truands profitants du désordre ou aliéné maraudant sur les routes d’Auvergne ? Les autorités se perdent en conjectures. Pour André Lange, directeur de la Police judiciaire et ancien des Brigades mobiles, l’occasion est toute trouvée de revenir en grâce aux yeux des caciques du nouveau régime. Mais réunir ses anciens inspecteurs, dispersés par la guerre, n’est pas une entreprise facile, surtout quand l’un d’entre eux, d’origine juive, croupit dans un camp d’internement. Pour les enquêteurs, coincés entre les exigences de l’occupant qui traque les maquis et les intrigues de la Milice, l’enquête est délicate. Heureusement, ils vont pouvoir compter sur Adèle, une jeune femme passionnée et courageuse. Ils découvrent finalement que les crimes semblent liés à des tablettes anciennes exhumées dans un lieu étrange : « le Vallon des Parques». Un site qui intéresse au plus haut point les nazis…
Chronique Montse
Policier reconnu avant la guerre, André Lange est maintenant dans un « placard doré », le nouveau régime lui propose alors le poste de Directeur des services de la police de sûreté avec comme mission essentielle arrêter le tueur qui s’attaque aux petites filles dans la campagne bourbonnaise. Pour mener cette enquête, il décide de faire appel à son ancien adjoint des brigades mobiles, Paul Montford, qui, à son tour, décide de reformer son ancienne équipe composée de 3 inspecteurs et la tâche ne va pas s’avérer facile. Elias a été licencié de la police et vivote en tant que forestier ; Lucien, juif, est dans un camp d’internement ; quant au troisième, il est mort.
Le début du roman s’attache donc à nous présenter les différents personnages mais aussi la situation ambiante avec les différents services de police français et allemands, la milice, etc… et les relations complexes et ambiguës qu’ils entretiennent entre eux. Un vrai nid de vipères. Chacun est à l’affût des erreurs de l’autre et tous se surveillent mutuellement. Le lecteur aura fort à faire pour s’y retrouver entre ces différents services et leurs nombreux acronymes. Mais une chose est sûre, il ne pourra que reconnaître le travail de recherches effectué par l’auteur à ce sujet.
L’enquête est presque secondaire dans un premier temps mais elle revient au premier plan par la suite. Malgré leur expérience et leur motivation, Paul, Elias et Lucien vont devoir la jouer fine afin de la faire progresser et par les temps qui courent, la chose est loin d’être aisée. Personne ne sait avec certitudes dans quel camp se trouve son prochain, collabos, résistants, tous se côtoient et chacun essaye de tirer son épingle du jeu. Cela donne également une part d’ambivalence aux différents personnages qui les rend très humains. Certes, ils feront tout pour résoudre ces meurtres atroces mais ils veulent aussi survivre à cette guerre. Sylvain Forge retranscrit parfaitement l’ambiance qui régnait à l’époque, impossible de faire confiance à qui que ce soit, les gens restaient sur le qui-vive en permanence.
Le rythme du roman pâtit un peu, à mon sens, des nombreuses explications historiques, qui sont, cependant, nécessaires pour la bonne compréhension de la situation de l’époque. L’enquête progresse peu à peu et même si la fin ne m’a pas surprise plus que ça, je dois dire que le tout s’avère très agréable à suivre.
Chronique Lynchmaniac
La première sensation qui vous envahit à la lecture du Vallon des Parques est l'originalité du cadre. De nombreux romans ont eu lieu sur la guerre, mais seulement très peu sur ce qui s'est passé à Vichy en 1943 au moment où la guerre a basculé.
Comme pour son premier roman, Sylvain Forge pose son intrigue doucement, prenant le temps de nous familiariser avec les personnages ainsi que leurs interactions. Cette mise en place pourra être perçue comme (trop ?) longue par certains lecteurs, mais ne m'a personnellement pas gêné. Disons que l'enquête, à proprement parler, ne commence pas avant la moitié du roman. Ce qui pourrait paraitre une faiblesse pour les férus d'enquêtes nerveuses est en fait, à mon sens, un des atouts du livre.
En effet, ce roman permet de nous faire vivre de l'intérieur une situation rarissime en France à savoir l'occupation par les allemands. À voir la vie avec les Allemands vue de l'intérieur. À comprendre tous les dilemmes que doivent subir continuellement les personnages entre leurs intérêts et leurs sens du devoir quitte à se compromettre définitivement. Cette partie du roman est vraiment passionnante et constitue la richesse du roman.
La partie enquête est quant à elle plus classique. Pour un gros lecteur de thriller/polar, elle emprunte des schémas classiques mais intéressants ramenés à la période du roman. Pour un lecteur novice donc ce sera une bonne découverte. Le background du coupable ainsi que ses agissements sont certes moins surprenants, mais sont loin d'être barbants et ont même un certain cachet par moment.
Le style de l'auteur est assez soutenu avec un vocabulaire et des tournures de phrases qui, je l'avoue, m'ont fait sortir le dictionnaire. L'écriture est très belle, mais souffre un peu du trop-plein de documentation. Je m'explique, le roman regorge de la recherche bibliographique de l'auteur sur cette période, ce qui est intellectuellement très enrichissant. Cependant, cela crée une certaine lourdeur au roman. Pour être plus précis, cela casse le rythme de l'intrigue ce qui a pour effet de la ralentir. Certes, ce n'est pas rédhibitoire, mais on sent que l'auteur a voulu mettre toutes ses recherches dans son roman. Une arme à double tranchant. Cet équilibre documentation/rythme est toujours très compliqué à réussir (comme dans L'Apothicaire) et au pire cela donne une mine d'information.
Comparé à son précédent roman, on sent une nette progression dans la dramaturgie, la gestion des personnages, ainsi que sur les dialogues qui rendent plus vivants cette histoire. Une petite critique concernant la quatrième de couverture. Quand elle révèle des informations qui se situent au-delà de la moitié du livre, j'avoue que pour l'effet de suspens ce n'est pas terrible. Donc, cher lecteur, ne lisez pas cette quatrième de couverture.
Pour résumer, Le vallon des Parques est un roman original par son cadre avec une intrigue solide mais un peu trop classique pour les vieux routiers du thriller, mais qui se lit sans déplaisir et avec beaucoup d'intérêt. Si Sylvain Forge confirme la progression qu'il a faite entre son premier et son second roman, j'ai plus que hâte de lire son troisième roman.
Le vallon des Parques - Parution janvier 2013. Éditions du Toucan