Bill a trente ans. Avocat, marié à une femme aussi belle que plaisante à vivre. Il a une fille, Linda, en pleine fleur de l'âge mais qui semble avoir oublié que se révolter est l'apanage des adolescents. Bill Halleck a donc la belle vie, et il vient d'être nommé associé au sein de son cabinet. La Vie est belle. Puis, il existe des moments où tout se passe bien, et où tout se dégrade en un instant. Il vit un de ces jours. Mettez-vous à sa place, il rentre en voiture avec sa femme à ses côtés. Elle a envie de lui, et commence à le caresser alors qu'il conduit. Pas grave, il peut très bien rester concentré sur la conduite. Sauf, qu'entre deux voitures, une gitane sort pour traverser, c'est l'accident. Et le tournant de sa vie. La gitane meurt, mais Bill bénéficie d'un non-lieu. Après tout, il est toujours utile d'avoir des amis juges et policiers. Mais le patriarche du clan gitan ne voit pas cette justice d'un bon oeil et impose sa propre justice. A la sortie du tribunal, il effleure Bill de son doigt marqué par les années, et murmure un simple mot Maigris. Depuis lors, il perd près d'une dizaine de kilos par semaine.
En général, Stephen King a un souci de début de roman, il installe le décor et les personnages. Et des longueurs apparaissent très vite. Ce défaut inhérent à cet auteur de génie est en quelque sorte sa marque de fabrique. Hé ben, pas dans ce roman. Et plus généralement, pas dans les romans qu'il a signé sous le pseudonyme de Richard Bachman. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : les romans signés sous ce pseudonyme sont parmi les meilleurs du maître. Et avec celui-ci, je confirme mon impression. Nous suivons la perte de poids de Bill Hayleck de façon physique avec le décompte qui fait office de chapitre. De plus, chose rare pour King, le personnage est présent à chaque page. Un peu comme un acteur qui serait de tous les plans d'un film. Il s'agit donc d'un huis-clos du point de vue des personnages. Et ce que nous vivons, c'est à travers les yeux de ce personnages. De ce point de vue, on peut douter de la logique de son raisonnement. Avons-nous vraiment sous les yeux les conséquences d'un maléfices. Nos doutes suivent ceux des personnages secondaires.
Par conséquent, ce roman se construit en trois étapes. La première est la découverte du problème et son explication. Maléfice ? Problème psychologique? Une fois que la raison est sure et évidente, il convient au personnage de trouver la solution, commence alors un road-book à travers les lieux de villégiatures du Maine, sur la côte est des États-Unis. Bill est à la recherche des gitans. La troisième partie du roman explore un autre style de récit : la vengeance. Bill fait tomber à son tour une malédiction sur ces gitans. Stephen King étend donc son talent à différents types de récits à travers un seul roman. De plus, ce roman nous prouve une fois de plus qu'il est véritablement un maître de la littérature moderne. En effet, ses personnages ont une véritable épaisseur et un véritable vécu qui fait que l'on s'attache à eux.
La peau sur les os, parution janvier 1999 - Editions J'ai lu