Thierry Cohen







Avril 2009

 



Bonjour Thierry Cohen, la première question est un rituel. Pouvez-vous nous en dire plus sur qui est Thierry Cohen ?
Il m'est difficile de parler des gens qui me sont proches et que je n'apprécie pas... Mais bon. Il se définit d'abord comme père de famille car c'est là qu'il trouve les fondements de son identité. Il est ensuite un fils, un frère et un ami. C'est un ami fidèle. C'est également un rêveur. Il vit deux vies en même temps. Celle que lui propose son quotidien et celle que lui offre son imagination. C'est aussi un mec qui s'emporte rapidement. Il aime ou déteste tout de suite et a ensuite du mal à réviser son jugement. Il accorde trop facilement sa confiance, son amitié. (Je commence à aimer parler de moi à la 3ème personne du singulier. Je m'alaindelonise)



Vous avez fait des études de psychologie et de sociologie, puis de communication avant de monter, avec votre frère, votre agence de communication. Comment êtes-vous venu à l'écriture ?
Je ne suis pas venu à l'écriture. J'ai toujours écrit mais sans en parler à personne. L'écriture était mon jardin secret, mon exutoire. On pense souvent que je me suis mis à l'écriture tardivement mais la seule nouveauté est qu'un jour j'ai envoyé mon premier manuscrit à des éditeurs et que certains d'entre eux l'ont aimé.



Vos deux romans, ("J'aurais préféré vivre" et "Je le ferai pour toi") sont tous deux empreints de mysticisme, pourquoi ce choix ?
Parce que c'est un univers infini offert à l'imagination. Si nous parvenons à fuir le monde réel, à échapper à l'emprise de la rationalité nous pouvons nous retrouver face à une multitude de portes qui ouvrent sur des univers parallèles, sur un champ des possibles incroyablement riche. Quelle est la frontière entre la vie et la mort ? Quelle est celle entre l'ici et l'au-delà ? Nous n'en savons rien, donc nous pouvons l'imaginer. Et imaginer, c'est exister autrement et ailleurs.



Il était question d'une adaptation cinématographique de votre premier roman « J'aurais préféré vivre » Où en est ce projet ?
Le contrat d'adaptation est signé ! C'est Gilles Paquet-Brenner, talentueux réalisateur qui va écrire le scénario et réaliser le film. Sans doute en 2010.



J'aurais préféré vivre est l'histoire de Jérémy, une histoire d'amour qui commence ... par un suicide. Pourquoi une telle entrée en matière ?
Le suicide est l'acte fondateur du roman, celui qui permet d'amorcer l'intrigue. L'aventure de Jeremy commence quand tout finit. En se suicidant, il entre dans un monde dans lequel il va devoir affronter son geste, les conséquences de sa folie. J'aime prendre les lecteurs par les tripes dès les premiers mots !



Comment vous sont venues l'idée et l'envie de raconter cette histoire ?
Mon meilleur ami s'est suicidé il y a quelques années. Et je me suis posé la question suivante : quelle histoire aurai-je pu lui raconter pour qu'il renonce à son geste ? Quels mots auraient pu lui faire prendre conscience qu'il n'était pas seul au monde, qu'il comptait pour sa famille, ses amis.




"Je le ferai pour toi" raconte l'histoire de Daniel, encore une fois une grande histoire d'amour. Comment cette histoire c'est imposée à vous ?
Je voulais raconter l'histoire d'un homme, d'une famille, d'une bande d'amis dont la vie bascule dans l'horreur. Des destins brisés par le drame, par la douleur. Et suivre, à travers l'intrigue, leur parcours psychologique. Comment réagit-on dans une telle situation ? Par la haine ? L'amour ? L'amitié ? L'amour et l'amitié sont des thèmes qui me sont chers.



L'amour et la souffrance, deux sentiments qui sont présents dans vos livres, pour vous ce sont deux choses indissociables ?
Non. L'amour domine tous les autres sentiments. La souffrance peut être une conséquence de l'amour. Mais l'amour peut guérir la souffrance. Dans mon roman, tous les personnages souffrent des conséquences d'un drame horrible. Mais chacun réagit différemment : certains utilisent la haine pour s'en sortir, d'autres l'amour et l'amitié. Mais, en définitive, l'amour triomphe !



Daniel est un père meurtri, on le comprend facilement, et son combat semble juste à nos yeux, pensez-vous que poussé à bout un Homme est prêt à tout ?
Grande question. Que ferions-nous si un de nos proches étaient tués par un fou, un fanatique ? Comment réagirions-nous ? En utilisant la haine comme exutoire ? En utilisant l'amour que nous éprouvons pour ceux qui restent pour continuer à se sentir en vie ? Je pense que nous pouvons répondre à ces questions de manière théorique. Mais nul ne sait quelle serait sa réaction dans une telle situation. Je me suis posé la question et ma réponse est ce roman.



Pour vous à quoi juge-t on la valeur d'un Homme ?

Aux regards que portent sur lui ses proches, sa familles, ses amis. Construire sa vie sur le fric, le pouvoir c'est se promettre de belles désillusions. Car, à l'heure du départ, il ne restera rien de tout cela. Construire sa vie sur l'amour des siens, les aider à construire la leur, c'est s'assurer de laisser une trace noble dans l'histoire d'une famille, d'une bande d'amis.



Les médias ont un grand rôle dans l'histoire, pensez-vous qu'on puisse encore leur faire une entière confiance ou est-ce devenu une course aux scoops ?
Quand les médias construisent leur approche sur la recherche de l'émotion, ils ne sont plus dans leurs rôles. Ils n'informent plus, n'expliquent plus. Ils donnent juste à voir quelque chose de fort. La compassion, le sensationnalisme perdent nombre d'entre eux dans les méandres de l'émotion gratuite. Mais les médias ont aussi la fantastique capacité de s'interroger sur eux-mêmes, de se remettre en cause.



Quels sont les auteurs qui vous font rêver ?

Les auteurs américains comme Fante, Kerouax, Mailer, Roth, Safran Foer, Krauss. Les auteurs français comme David Foenkinos, Djian mais aussi Anna Gavalda ou Tatiana de Rosnay dans une approche plus grand public.



Vos derniers coups de cœur littéraire ?
Ron Leshem, « Beaufort » : Un roman très fort sur la guerre du Liban. Ariane Bois, « Et leurs jours seront pour eux comme la nuit », un magnifique roman sur le deuil après la perte d'un être cher. Eric Genetet, « Le Fiancé de la Lune » : un roman d'amour émouvant, fin et bien écrit.



Qu'auriez-vous envie de dire aux lecteurs qui ne connaissent pas encore vos livres ?
Je vous accorde le pardon.



Merci beaucoup Thierry Cohen, nous vous laissons le mot de la fin.
« Je ne veux pas atteindre l'immortalité grâce à mon œuvre. Je veux atteindre l'immortalité en ne mourant pas » Woody Allen
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