Lazaro Martin Manca






Avril 2010






Bonjour, la première question est une sorte de rituel sur Plume Libre. Pouvez-vous nous dire qui est Lazaro Martin Manca ?
Je crois que je ne le sais pas vraiment moi-même. Je peux dire que j'ai une apparence agréable, que j'ai, par malheur, déjà 40 ans, et que le reste n'est pas très important ou très utile pour ceux qui me lisent.


Vous avez travaillé dans un musée avant de retourner à Tenerife pour vous occuper d'une concession de location de voitures. Comment en êtes-vous arrivé à l'écriture de roman ?
J'ai toujours un peu écrit et inventé des histoires. Je n'avais jamais vraiment cherché à être publié jusqu'à une date très récente. Cela aurait très bien pu ne pas se faire et que je demeure totalement inconnu. Je n'en aurais pas souffert. Quitte à choisir j'aurais préféré la poésie ou le théâtre, mais on ne choisit pas toujours. Le romanesque s'est imposé.



Les mystères de Tenerife vient de sortir en France aux éditions Le Passage. Quel a été le parcours de votre roman, de sa conception jusqu'à son édition ?
A l'origine, il s'agissait d'une nouvelle avec ce personnage de Vicente. Comme il m'a plu, j'ai décidé de continuer de le faire vivre, sans projet, juste pour le plaisir d'être avec lui. Petit à petit cela a pris forme et j'ai décidé de structurer davantage mes récits pour en faire un ensemble cohérent.
Le manuscrit a un peu circulé autour de moi. Il se trouve que j'ai un ami traducteur qui m'a présenté à une amie française à lui (Andréane Bernard) ; elle a voulu lire mes textes et a proposé de les traduire pour la France alors que je venais à peine d'entamer les négociations avec un éditeur espagnol. 


Les Mystères de Tenerife est un polar atypique. Il surprend le lecteur surtout par sa construction avec des chapitres indépendants, des aventures de votre personnage principal :le détective Vicente Clavijo Rodriguez. Pourquoi ce choix ?
Je ne sais pas s'il est atypique. Disons que j'ai toujours eu l'impression que dans beaucoup de romans de 200 ou 300 pages, il n'y avait finalement que quelques dizaines de pages indispensables, le reste n'étant que du remplissage. Dans mes histoires, je tente de me limiter à cet indispensable. Et puis ça raconte plus ou moins une année de la vie de Vicente, d'où les nombreuses aventures qui lui arrivent.


Dans votre roman, beaucoup de mystères restent en suspens sur les personnages principaux. Vont-ils être développés dans d'autres aventures ?
Les personnages de fiction sont un peu comme les gens : même si on les fréquente régulièrement, on en ignore l'essentiel. Cette part de mystère est la plus intéressante, surtout quand elle est difficile à comprendre. Ces personnages vivent tout simplement dans mes pages et en dehors d'elles, il est donc probable qu'avec le temps, on en apprendra davantage sur eux.
J'ajoute qu'en dehors de Vicente, les autres personnages sont librement inspirés de gens réels. Certains sont reconnaissables pour ceux qui les connaissent.


Dans chaque chapitre vous abordez un thème grave traité avec beaucoup de finesse. On est dans un polar mais il y aussi un regard social, humaniste voir journalistique qui montre certaines dérives de l'île de Tenerife qui sont universelles. C'était une volonté de votre part dès le départ d'aborder ces sujets ou est-ce le lieu et l'histoire qui les ont amenés ?
Oui... Sinon je ne vois pas l'intérêt d'écrire. Les romanciers qui ne veulent que raconter des histoires sans regard critique du monde qu'ils décrivent, n'ont aucun intérêt. Je préfère voir un film, on perd moins de temps. Il y a sur Tenerife des tas de choses universelles autant que singulières. C'est une bonne matière pour un romancier.


L'île de Tenerife est le décor de votre roman mais aussi l'un des personnages principaux. De France, Tenerife est surtout une direction touristique. Qu'avez-vous envie de transmette comme autre image ou message de votre île?
J'ai un regard bienveillant sur cette île, mais aussi sans concession. Ce n'est pas un paradis, ce n'est pas un enfer et je ne cherche pas à transmettre d'image particulière. Je ne suis pas payé par l'office du tourisme. Comme décors, c'est une île plutôt variée.


Tenerife a sa propre identité. En quoi diffère-t-elle de celle de l'Espagne ?
C'est une terre de colonisation, de migration, un lieu de passage aussi, ça fait une grande différence. Le rapport à la terre, aux hommes et à Dieu n'est pas comparable à celui de la péninsule. En même temps je n'en suis qu'un bâtard. C'est à ma mère qu'il faudrait poser cette question, mais il est trop tard.


C'est à Barcelone, dans l'après Franco, que le polar espagnol prend son envol avec des auteurs comme Manuel Vazquez Montalban, Francisco Gonzalez Ledesma, Eduardo Mendoza... Vous sentez-vous l'héritier de ces grands auteurs, quelles sont vos influences ?
Vous citez de bons auteurs ; mais je me crois plus volontiers l'héritier de poètes comme Machado, Lorca ou Vicente Aleixandre dont mon héros porte le prénom, même si je n'écrit pas de poésie. Mes influences sont par ailleurs assez classique : les romans russes et français que j'empruntais à la bibliothèque...


L'Espagne est très attirée par le fantastique que ce soit en littérature avec des auteurs comme Carlos Ruiz Zafon ou au cinéma avec un réalisateur comme Alejandro Amenábar. Est-ce un univers qui vous attire également et que vous souhaiteriez explorer lors d'un prochain roman ?
J'aime assez l'idée qu'il existe une dimension fantastique dans l'univers, même si je suis parfaitement athée et matérialiste, ça rend tout ça plus vivable, je crois. Je ne suis pas sûr que ce soit typiquement espagnol ni que j'exploite davantage ce genre...


Vous êtes comme votre héros Vicente Clavijo Rodriguez un passionné de golf. Vous avez quelques parcours à nous conseiller à Tenerife ou ailleurs ?
Je suis loin d'être aussi bon que mon personnage mais j'aime beaucoup ce sport. Je connais quelques parcours autour de Barcelone ; j'ai longtemps été un « socios » du golf club de Llavaneras ; ici à Tenerife, je vais surtout sur les parcours du sud car c'est plus pratique pour moi que le Golf Royal ou que celui de La Gomera.



Que représente la France pour vous ? Allez-vous y venir pour des dédicaces ou salons ?
Je connais mal la France en dehors de la région de Perpignan. Je ne suis allé qu'une fois à Paris. Il est peu probable que j'y vienne si le but est d'y faire des dédicaces...


Quels sont vos projets, votre prochaine actualité ?
J'écris et j'arrive à la fin du deuxième volume des aventures de Vicente... Il y a dedans un scorpion qui parle... On verra ensuite.


Quels sont vos derniers coups de cœur littéraires, cinématographiques ou musicaux ?
Coup de cœur littéraire ? Jorge Volpi, un Mexicain vraiment intéressant, mais ça n'est pas une découverte, c'est une confirmation. Le cinéma, j'y vais rarement. Je loue des DVD donc je fais rarement de découvertes. Quant à la musique, j'écoute encore beaucoup les disques de rock de ma jeunesse.


Que pensez-vous de l'influence d'Internet sur la promotion de la littérature ? Êtes vous présent sur le Net ?
Je n'en pense rien. Je me sers surtout du courrier électronique. Je suis rarement présent sur le Net sauf pour un peu de recherche personnelle et pour mon travail.


On vous laisse le mot de la fin.
Un mot ? Liberté.  


* Traduction des questions : Montse
* Traduction des réponses : Andréane Bernard

Du même auteur : Biographie, chronique, interview
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