Bérenger Philippe






Les ombres

   

 

 



35 morts lors d’un attentat dans le métro parisien et une suspicion de récidive du coté de Lyon suffit à instaurer un climat de psychose dans la France entière. Le groupe du capitaine de police Franck Venel se voit confier une partie de l’enquête afin de voir si l’attentat ne provient pas d’une des cités qu’il surveille.

« Les ombres » nous plonge dans le monde du renseignement. Un monde rarement présenté sous ce jour-là. Ces flics sont les ombres des pseudo-terroristes. Leur métier consiste à tout connaitre de leurs vies et à lancer l’arrestation seulement au moment opportun. De par la nature de leur métier, plutôt attentiste, ne vous attendez pas à un roman bourré d’actions. Ici, il s’agit d’observer, de repérer, de réfléchir et de déduire, afin de dresser l’organigramme des structures terroristes. Cependant, Philippe Bérenger a le bon goût de nous présenter cet univers sous une forme très attrayante avec un très bon équilibre dans le rythme entre les séquences dites de suspens et les séquences plus intimistes qui nous permettent de mieux cerner les personnages.

Justement, l’auteur suit l’intrigue à hauteur de personnage sans jamais donner l’impression de manipuler le lecteur. Le lecteur suit l’intrigue comme si elle était filmée caméra à l’épaule, brute et intense. Philippe Bérenger a réussi ses personnages qui sont tous très bien cernés et nous touchent par leurs qualités, leurs défauts, en un mot leurs humanités. Même l’introduction de l’ensemble du groupe est, selon moi, un peu trop abrupte. En un chapitre, il faut intégrer multitude d’informations sur l’ensemble du groupe, soit sept personnes. Mais après le récit s’enchaine et les personnages prennent forme merveilleusement bien. Franck Venel est un excellent personnage de roman avec sa mauvaise humeur, ses frustrations et ses envies (y compris sexuelles). C’est aussi sur le champ des frustrations que le romancier nous attire quand il nous explique combien les enquêteurs peuvent être frustrés de ne pas pouvoir arrêter des délinquants, tandis que ceux-ci ont la belle vie avec des grosses voitures, de l’argent facile et les filles qui vont avec. Cette ambigüité flic/voyou contribue à donner un aspect plus réaliste à l’intrigue.

A ce sujet, le lecteur remarquera que le côté réaliste a été particulièrement soigné et on est assez loin de l’image de James Bond. Ici, le travail est laborieux et peu spectaculaire, sauf lors de certaines tâches. L’intrigue est menée avec rythme et l’auteur ne laisse jamais le lecteur sur la touche. La description des habitudes des terroristes/délinquants fait froid dans le dos. Quelques légères invraisemblances (surtout sur la fin) rappellent qu’il s’agit d’un premier roman. Mais rien qui ne peut gâcher le plaisir de cette lecture. Le roman prévaut surtout pour son background, l’histoire en elle-même étant plus « classique ».

Le cahier documentaire vient apporter un éclairage sur le roman. Il est très détaillé, même si, comme pour « Opération Goliath », le lecteur peut regretter le peu de pages qu'il contient. Il est clair qu’écrit ainsi on ne peut qu’en demander plus.

Au final, « Les ombres » est une descente en immersion dans le monde du renseignement, dense, intense et diaboliquement jouissive. C’est un roman qui prévaut surtout pour son approche réaliste de ce monde-là. Si vous cherchez un roman percutant et intelligemment écrit, n’hésitez pas une seconde. Une très bonne lecture que je conseille.


A noter que contrairement à « Opération Goliath » de Denis Alamercery, « Les ombres » parait sous le nom de l’éditeur Scrineo et non « Les Carnets de l’info ». En voici la raison : La maison d’édition a commencé en 2006 sous la marque Les Carnets de l’info, qui publient notamment de nombreux guides pratiques ou des « témoins ». La maison d’édition s’étant lancée dans des fictions jeunesses à partir de 2010 sous la marque Scrineo, la décision a alors été prise de mettre toute œuvre de fiction sous la marque Scrineo.  Le premier polar "Opération Goliath" est sorti avant/pendant la création de la marque Scrineo, c’est pourquoi il était alors sous Les Carnets de l’info.

Les Ombres, parution avril 2011, éditions Scrinéo.
 

 
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