François-Xavier Dillard


Interview de François-Xavier Dillard

Bonjour François-Xavier Dillard. Pour commencer, le petit rituel de présentation de Plume Libre, pouvez-vous nous en dire plus sur vous ?
Je mesure 1 mètre 80, je pèse entre 70 et 80 kilos (en fonction de la date de mon dernier Dukan), j’habite à Paris, j’ai une Mégane Scénic gris métallisé qui sent le vieux BN, la banane séchée et la fraise Tagada moisie. Je suis amoureux  de Clarisse, mon épouse, et j’adore de manière tout à fait excessive mes filles Agathe et Castille à qui je pardonne tout avec une légèreté coupable… 


Comment est née l'envie d'écrire ce livre ? Et d'écrire tout court ?
C’est drôle, je n’ai jamais aimé écrire des cartes postales, des lettres, un journal… Par contre j’ai tout de suite adoré, dès que j’ai su le faire à peu près correctement, raconter des histoires, inventer des vies, imaginer des héros et les récits et dialogues qui vont avec. La preuve, en troisième B, j’ai eu la meilleure note du brevet des Collèges blanc du collège Jean Moulin du Pecq, dans les Yvelines ( je suis précis parce que je suis certain qu’il doit y avoir un collège Jean Moulin dans toutes les communes de plus de 30 000 habitants). J’avais imaginé la suite d’un chapitre de « Premier de cordée », le roman de Frison-Roche. Franchement, je ne me suis jamais relu et je ne me souviens pas très bien du récit mais je suis sur que c’était un excellent texte, peut-être mon meilleur…


Pour un premier roman, de l'écriture à la publication, le parcours a-t-il été difficile ou non ?
Oui et non.
Non, parce que « Un vrai jeu d’enfant » est le premier manuscrit de roman achevé que je soumets à un éditeur et qu’en vrai je ne l’ai envoyé qu’à deux maisons d’édition. Je vais taire le nom de la première, qui me l’a refusé avec beaucoup d’élégance et de tact, avec un petit mot manuscrit m’incitant à retravailler le texte pour soumettre une version plus aboutie. Mais la seconde version, je l’ai soumise au Fleuve et je m’en félicite. Ensuite ce sont des mois d’attente, pas tellement fébriles (un peu quand même) parce que j’ai aussi un job très sympa dans ma vie de non-écrivain. Et que cette même  vie est remplie des joies intenses, des bonheurs simples, des chagrins éphémères, d’instants inoubliables et de l’odeur douçâtre de vieilles fraises « tagada » écrasées dans la voiture.
Oui, parce que je ne suis déjà plus un  si « jeune » auteur (en terme de datation carbone 14), et que finalement je me dis que si je m’étais lancé plus tôt j’aurai peut-être  déjà plein de bouquins dans les brocantes. Donc le chemin, plus que difficile, a été long. Mais c’est juste  ma faute et je vais donc m’empresser de rattraper le temps perdu. Amis lecteurs, vous n’avez pas finit de me lire !  


Un vrai jeu d’enfant - François-Xavier DillardVotre roman « Un vrai jeu d’enfant » est paru depuis quelques semaines (Fleuve Noir), pourriez-vous nous le présenter ?
C’est un très bon roman. Pour plus de détails je vous invite à aller en acquérir un exemplaire... Plus sérieusement,  j’ai voulu raconter dans ce livre comment les plans les plus simples pouvaient aboutir au désastre le plus complet. Ici, chacun des personnages pense que tout va se dérouler comme prévu, Emma cette étudiante ordinaire –donc fauchée- qui accepte de convoyer incognito des bijoux dans Paris. François, Momo et Ben qui pensent pouvoir sans problème enlever cette gamine et récupérer les bijoux. Marc, le flic qui connait tous les détails de l’affaire et qui croit pouvoir serrer tout le monde facilement. Ce qui m’intéressait surtout c’était de confronter Emma, son insouciance, son ironie, sa fraicheur, à l’hyper-violence du grand banditisme ordinaire. Et puis c’est aussi une histoire de rédemption, de révélation. Bref, c’est vraiment une histoire super… Non ?  
Chaque chapitre est raconté par un des personnages, à tour de rôle. Je pensais que cela me permettrait une aisance narrative et une tension dramatique plus importante. Ce qui s’est révélé vrai mais qui s’est aussi avéré très compliqué à mettre en place en terme de cohérence et d’absence de répétition. Mais finalement je crois que le résultat fonctionne bien… Aux lecteurs de le dire !


Comment écrivez-vous ? Aviez-vous toute la construction du roman en tête avant de commencer, notamment les trois derniers chapitres qui sont surprenants et déroutants ?
Plutôt que « Comment » c’est « Où » écrivez-vous qui est plutôt rigolo (et si je veux, je refais les questions des journalistes). En fait j’adore écrire dans les transports et particulièrement dans les trains. Un bon Paris-Marseille, un « Ipod » sur les oreilles, une play-list bien hétéroclite et je suis le plus efficace des écrivains ! En voiture aussi j’aime écrire. Je conduis très peu et c’est le plus souvent Clarisse qui s’y colle. Alors là, pareil, Ipod et écriture jusqu’à ce que cette même Clarisse décide, à juste titre surement, que je suis un peu gonflé et qu’elle n’est pas chauffeur de maître (je le sais bien qu’elle n’est pas chauffeur, je serai assis à l’arrière sinon).   
Pour ce premier roman, je suis parti d’une nouvelle que j’avais écrite il y a trois ou quatre ans. J’avais donc déjà l’histoire en tête et puis elle s’est enrichie au fil de l’écriture. Quant aux derniers chapitres que vous évoquez je les dois en grande partie au travail accompli avec Céline Thoulouze , mon éditrice. Elle possède un sens aigue de la narration et de la tension dramatique (bon c’est un peu son job en même temps) et c’est elle qui a su, au cours du travail de réécriture, enrichir les personnages, leur donner plus de corps et, finalement, les amener à ce dénouement… étonnant.


Quelle a été la réaction de votre entourage, famille, amis et collègues, à la lecture d’Un vrai jeu d’enfant ?

Les réactions sont très positives, surtout ma mère… En fait, la plupart des gens qui me connaissent  me disent qu’ils ont l’impression de m’entendre lorsqu’ils lisent certains passages d’ « Un vrai jeu d’enfant ». Je ne sais pas si c’est bon signe mais c’est au moins la preuve que c’est moi qui l’ai écrit !
Et ce qui est vraiment drôle c’est que  90% des gens qui me parlent de mon livre finissent, à plus ou moins long terme, par me poser la même éternelle question : « Combien de temps tu as mis pour écrire ce livre » ? C’est drôle parce que je n’en ai franchement pas la moindre idée. Dans la mesure où je n’écris pas tous les jours, où il m’arrive de produire deux chapitres en trois heures (bon c’est vrai mes chapitres sont courts) ou d’effacer sans regret une demie-page que j’ai laborieusement produite en deux jours, je ne sais pas quantifier le temps que j’ai mis à écrire ce manuscrit. Donc je n’ai toujours pas de réponse précise à donner, disons entre 1 an et deux ans ? Mais peut-être est-ce beaucoup moins… Ou beaucoup plus ?


Il faut beaucoup d'imagination pour inventer une histoire, où puisez-vous vos idées ?

Dans l’actualité parfois, dans les faits divers comme pour mon prochain roman par exemple… Les personnages quant à eux sont souvent un mix de gens que je connais bien, il y a aussi un peu de moi, surement. Dans « Un vrai jeu »  il y a toutefois un personnage qui a été très fortement inspiré par ma jeune sœur Elise, c’est Emma.  Elise, si tu tombes sur cette interview sache qu’il est hors de question que tu touches une partie des droits d’auteur. N’essaie même pas ! Et pour trouver les noms (de famille) des personnages et bien je me suis autorisé reprendre ceux de mes amis, c’était le plus simple (sans autorisation aucune mais pour l’instant personne en s’est plaint… Personne ne l’a lu ?)  
Mais pour ce premier roman j’ai totalement inventé l’histoire de ce convoyage anonyme. Et c’est en fait la réalité qui m’a rattrapé. J’ai discuté un jour avec un de mes amis, un grand flic parisien, qui m’avait fait l’amitié de lire le manuscrit pour en vérifier la cohérence (je me souviens très bien qu’il m’avait dit à l’époque  « je suis certain que tu vas être publié », comme quoi le flair…). Après la lecture il m’a précisé qu’il leur arrivait de mettre en place des opérations de ce type. La seule grande différence c’est que c’est un policier qui trimballe les objets de valeur, pas une étudiante… Mais avouez qu’avec Emma, les choses avaient quand même plus de chance de déraper.


Que diriez-vous aux lecteurs qui n'ont pas encore lu votre livre ?
Je leur dirais simplement que je crois que ce livre peut plaire aux amateurs de polars et de romans noirs mais aussi à ceux qui ne sont pas fans de ce genre de littérature. Une littérature que je connais finalement assez peu et dont je ne sais pas si j’ai vraiment respecté les règles. Certes il y a des morts, des policiers, des malfrats dans mon livre mais il y a aussi des héros ordinaires  qui vivent des choses très extraordinaires.
Et pour les non-lecteurs qui se seraient égarés sur ce site je leur dirais « attendez qu’il sorte en film » !


Quelles sont vos influences littéraires, vos derniers coups de cœur ?
Je suis très hétéroclite dans le choix de mes lectures et j’ai toujours deux trois livres en cours. De tous genre (un King, le dernier Jean-Paul Dubois, « la conjuration des imbéciles » que je relis régulièrement, un Asimov…). Mais la dernière grande claque littéraire que j’ai prise c’est avec « Rien ne s’oppose à la nuit » de Delphine de Vigan. C’est un livre fantastique, d’une sobriété extraordinaire. Ce qu’elle raconte du combat qu’elle mène pour être une petite fille puis une femme ordinaire, juste ordinaire, au milieu de cette famille déglinguée et auprès de cette mère différente est tout simplement bouleversant.


Des projets à venir ?
Et bien oui, et pourquoi pas… Un autre livre ? Allez, je vous en dis un peu plus. Le « pitch » de mon second roman a été accepté par mon éditrice et l’écriture en est déjà commencée. C’est un thriller, très différent d’  « Un vrai jeu » peut-être plus psychologique… L’histoire d’un homme qui tente de surmonter un traumatisme d’enfance (pour le coup c’est un vrai beau traumatisme mais je ne peux pas vous en dire plus).


Vous avez parfois de drôles d’idées, non ? Des pigeons qui parlent, c’est quoi c’te histoire ?
Vous évoquez là un sujet très douloureux… Ces pigeons, hélas, nous ont quitté à la suite d’une intervention pour le moins sans appel de Céline Thoulouze. C’est une éditrice qui a beaucoup de qualités mais une grande aversion pour les bêtes à plumes en général et les pigeons en particulier. J’avais pourtant écrit dans le manuscrit originel, deux très beaux chapitres, très littéraires, très puissants, dans lesquels je faisais raconter certains passages clefs du livre par des pigeons. Cela permettait une distance narrative et une profondeur sémantique jamais égalée depuis… La Fontaine ? Au début Céline m’a juste dit « je ne sais pas trop pour les pigeons ». Mais nous ne nous connaissions pas très bien encore… Plus tard, un jour de mars, j’ai reçu un mail de sa part avec la photo d’un pigeon écrasé. La légende était brève et rude, le message clair : « Les pigeons, ça pue ! ».
Et oui, le monde de l’édition n’est pas fait pour les âmes sensibles. On y gagne, c’est vrai,  l’immense bonheur d’être lu mais on y perd aussi, parfois, son innocence et sa capacité d’émerveillement au monde… Tiens, comme dans « Un vrai jeu d’enfant ».


Merci, François-Xavier Dillard, pour le temps que vous nous avez accordé, nous vous laissons le mot de la fin.
Alors un grand merci à Plume libre de donner de la place à un premier roman, merci aux futurs lecteurs de donner du temps à sa lecture, merci à Céline Thoulouze de donner tant d’énergie pour ses auteurs, merci à Clarisse pour son exigence, merci à Agathe et Castille de ne plus laisser trainer de vieux gâteaux dans la voiture !
Merci à tous et à bientôt.  


Go to top