Duel en enfer
Afin de répondre à l'attente de nombreux lecteurs Georges Newnes, éditeur du Dr Watson, convoque ce dernier dans son bureau. Il vient effectivement d'apprendre qu'il existerait un manuscrit relatant les mémoires de l'illustre docteur durant la période où sévissait le tristement célèbre Jack l'éventreur. Rien ne laisse pourtant présager qu'Holmes et l'éventreur ne se soient jamais « rencontrés », serait-il donc possible que le grand détective ne se soit pas penché sur cette enquête ? Le dernier manuscrit prouve le contraire, mais pourquoi avoir tenu ces investigations secrètes ?
Mettre en scène le plus célèbre détective du Royaume Uni n'est déjà pas chose facile mais si l'on ajoute à cette histoire l'un des plus grands mystères du monde policier, l'aventure relève carrément du défi. Les fans de Sherlock Holmes diront peut-être que c'est une des nombreuses reprises qui n'aurait pas du être faite, qu'on ne touche pas à un chef d'œuvre et tellement d'autres choses, pour ma part (oui je ne suis pas une fana du détective) j'avoue avoir été séduite par le style, les recherches, les descriptions et par le Docteur Watson qui m'apparaît ici sous un jour nouveau. Holmes, que j'ai toujours trouvé arrogant, sexiste, égoïste ... se montre sous la plume de Bob Garcia un rien plus humain, presque touchant. On découvre qu'il peut ressentir des émotions (même s'il les cache fort bien), un humour bien tourné, des répliques piquantes et fortes à propos. J'ai par moment eu plaisir à le découvrir.
Le fait que l'enquête nous soit révélée sous la forme du journal intime du docteur Watson apporte un peu plus de réalisme au récit, qui met un petit moment à vraiment nous plonger au cœur de l'enquête, mais nous permet de découvrir ce qu'a été la vie du docteur à cette période, son mariage qui prend une mauvaise tournure, la jeune Wendy qu'ils recueillent Holmes et lui alors qu'elle était dans la rue et qui aura une grande importance dans la vie de Watson à cette époque.
Pas mal de questions posées, beaucoup de pistes et de suspects on ira même jusqu'à penser que si Holmes n'a jamais parler de Jack L'éventreur c'est qu'il est l'auteur de ces crimes monstrueux. Quand au dénouement, Bob Garcia ne nous sort pas la théorie « irréfutable » mais une solution qui est assez étonnante et réaliste pour que l'on puisse y croire. Et je vous avoue que le nom du coupable et les raisons sont quelque peu passées au second plan tant j'étais prise par le portrait de cette ville poisseuse et crasseuse où l'on croise les pires rebuts de la société, on passe de l'enfant qui fouille les poubelles et court toujours à la recherche de quelques menus travaux qui lui rapportera, avec un peu de chance un sou ou deux, à la prostituée qui étale la marchandise à même la table dans l'espoir d'obtenir une petite pièce, non pour manger ou nourrir sa famille, mais pour lui permettre de boire encore un peu plus, histoire de ne plus se souvenir d'où elle est et ce qu'elle doit faire pour survivre.
A Whitechapel il n'est pas rare de croiser un mac, ou tout simplement un ivrogne qui tabasse allègrement sa femme, ou l'une des filles qu'il tient sous sa coupe, et ça sans aucune raison. De tout et pas que du beau, un peu comme si la ville nous montrait ce qu'elle a de plus moche, un appel à l'aide que personne ne veut entendre.
Des descriptions fouillées, qui permettent sans aucun mal d'imaginer le Londres de l'époque Victorienne, les bas quartiers, la crasse, la pauvreté. Une galerie de personnages peu reluisants tous aussi surprenants les uns des autres.
Résultat des courses, même si je reste réfractaire au personnage de Sherlock Holmes, Bob Garcia a gagné une nouvelle lectrice !
Duel en enfer, parution novembre 2008. Editions du Rocher
Parution février 2010, éditions J'ai luDu même auteur sur Plume Libre : Biographie, chronique, interview
