Nicolas Paillusseau

 




 
Décembre 2009

 

 

 

Bonjour Nicolas Paillusseau, la première question rituelle de la présentation sur Plume Libre, Pouvez-vous nous décrire qui est Nicolas Paillusseau ?

    Alors c'est simple. Nicolas Paillusseau est un petit garçon de dix ans. Dix ans de pub qui lui ont sans doute permis de travailler une écriture ramassée. Et sinon je suis aussi un tout petit papa de deux ans. Voilà en un mot, j'ai tout l'avenir devant moi ;-)


Comment le démon de l'écriture s'est-il emparé de vous ? Pourquoi ce média d'expression plutôt qu'un autre ?

    Démon est le mot juste. Il s'est emparé de moi devant un feu de cheminée en Bretagne dans lequel crépitaient des scories rougeoyantes. Une vraie gueule d'enfer. Je lisais Chattam, l'âme du Mal. Je me suis crû pendant des heures au cinéma. Et j'ai ensuite eu envie de littéralement « reproduire » l'effet vécu. Voilà pourquoi j'essaie d'avoir une écriture imagée. Transporter les gens dans leur propre salle de ciné corticale est mon seul objectif.

Comment s'est passé la recherche de la maison d'édition ? Parcours du combattant ou bien simple ballade ?

Fin 2007 j'avais terminé mon manuscrit. Je l'ai d'abord envoyé à des maisons d'éditions reconnues qui l'ont toutes refusées malgré quelques encouragements. Au final j'ai profité du lancement d'un concours d'auteurs amateurs (Le prix du roman de l'été par PRISMA PRESSE) pour faire éditer mon roman. Ce fût pour moi une grande étape. Il y en a 3 d'ailleurs selon moi dans la vie d'un auteur. La première, terminer un roman. La seconde, réussir à se faire publier. La troisième, en vivre. A ce stade j'ai réussi les deux premières. Il me reste à concrétiser la troisième.


Quelles sont vos influences littéraires ? Vous revendiquez-vous d'un auteur en particulier ?

    Chattam, Beigbeder, Coben, Douglas Kennedy. Mais s'il n'y en avait qu'un ce serait Thilliez. J'adore son écriture vive, directe, transperçante...


Comment définiriez-vous votre style ?

    Au cutter ou à la serpe. Particulièrement dans MA CHAIR A VIF. J'essaie volontairement de tendre mon écriture pour que le lecteur soit véritablement happé par le rythme et l'histoire. C'est aussi une déformation professionnelle de mon métier de publicitaire. Vouloir faire des phrases choc. Des formules courtes.


Quel est la journée type de Nicolas Paillusseau quand il écrit ?

    Finalement j'ai peu de journées où j'écris. Tout juste des soirées après le travail. Ce qui au final me laisse peu de temps. J'ai profité d'une période de recherche d'emploi pour écrire « Ma Chair à Vif ». Et là, la journée type se résumait ainsi... Café. Pièce close. Silence. Lumière tamisée... et souffrances tellement la construction de l'histoire me prenait la tête au sens premier du terme. 


Comment vous est venue l'idée du roman ? Quel est le point de départ de ce thriller ?

    Après m'être perdu dans une histoire d'environ 400 pages que je n'ai jamais terminée, je cherchais un point de départ à autre chose qui me permettrait de me détacher de mon premier roman. Il me fallait une bulle d'oxygène pour repartir sur autre chose. Un jour dans la rue, j'ai eu le déclic en croisant un jeune papa sur le trottoir qui marchait à côté de son fils. Et là je me suis dit... et si un taré passait à ce moment là, que se passerait-il... j'ai alors écrit le premier chapitre de mon roman. Ensuite je me suis dit... et si ce taré était le narrateur... et voilà, l'histoire commençait.


Le début du roman nous as fait penser à "Pour Elle", le thriller de Fred Cavayé, dans votre manière de pousser quelqu'un de normal dans la voie de l'illégalité. Que représente cette "descente en enfer" pour vous ? Vous vouliez vraiment faire souffrir votre personnage à ce point ?

    L'idée première était de comprendre comment un individu lambda pouvait passer de l'autre côté.  Mon objectif étant de projeter le lecteur dans un « vécu possible ». Il devait se dire « ça peut m'arriver ». Je pourrais, si les circonstances l'exigeaient, à mon tour, basculer... de là à aller kidnapper un gamin en pleine rue ce n'est pas évident, mais après tout je crois que n'importe qui peut faire n'importe quoi contre un bon motif. Et donc à cela il fallait un motif valable. Mais une fois que j'ai commencé à écrire l'histoire de Pierre Forest, je me suis rendu compte que ce récit « physique » devait avoir plus de profondeur. C'est là que Salomé est intervenue... et que la descente aux enfers a réellement commencé pour Pierre. Enfin je souhaitais aussi que le lecteur vive avec le personnage principal. L'idée d'utiliser la première personne était donc capitale. Je voulais un récit « caméra au poing » où le lecteur pouvait s'immerger dans l'univers de Forest. Jusqu'à ses pensées les plus primales.


On est clairement du coté d'une écriture cinématographique tant par les images déployés que par le rythme. Était-ce une volonté délibéré ou bien cela est venu comme cela ?

    Délibérément délibérée !!! Jusqu'à 25 ans je n'ai jamais été un grand lecteur à cause des romans qui ne commençaient réellement qu'à la moitié de l'œuvre. En lisant des auteurs comme Chattam ou même Jean Paul Dubois, j'ai trouvé une résonance nouvelle dans l'écriture. Une écriture cinématographique qui m'a particulièrement plu. Enfin comme il s'agissait d'un premier roman, il fallait pour moi que les éditeurs éventuels puissent très vite se projeter dans l'histoire pour se l'approprier. D'où la nécessité dès les premières pages d'imager mes propos et de faire partir l'intrigue comme un élastique.

 
La partie dans le souterrain à Prague renvoie aux intrigues dans les égouts de Paris (Les misérables) ou le métro new-yorkais (à l'instar de In Tenebris de Chattam). Était-ce des références voulues, affirmées ?

    Pas du tout si ce n'est que j'adore Chattam. Mais il me fallait un endroit qui serve la narration. C'est un long passage où se dénouent beaucoup d'éléments du roman. Il fallait « meubler » ce débobinage de fil d'une atmosphère cohérente avec la pression que vit Forest tout au long du roman. Donc une ambiance lourde. Asphyxiante. Tiens, c'est drôle. En vous le disant c'est la première fois que je comprends comment cette idée du « Cercle » m'est venue finalement assez naturellement. En clair, je crois que j'ai voulu privé d'oxygène le lecteur comme mon personnage principal tout au long du roman. L'autre idée du Cercle était de faire un parallèle avec les « règles » de la mort (l'anonymat, le silence...). Ne manquait plus que l'éternité ;-)... Mais contrairement à Chattam qui a beaucoup enquêté sur les mondes sous terrain et notamment dans « La Promesse des Ténèbres », cette partie là dans mon roman est uniquement et strictement imaginaire. Le Cercle n'existe pas ailleurs que dans ce roman. Mais étant en République Tchèque, il me fallait quelque chose de crédible ancrée dans l'histoire même du pays. Un pure fantasme d'auteur en quelque sorte. Mais je n'ai pas la prétention d'avoir réussi à faire ici du Chattam.


Faut-il justement se détacher des références tant littéraires que cinématographes que l'on possède lorsque l'on se lance dans l'écriture de son premier roman ? Si oui, comment peut-on s'en détacher ?

    En grand fan des auteurs que j'ai cité plus haut, je cherche d'abord à produire une intensité dans l'écriture. Même si je ne me compare pas à eux, l'idée d'imprégner le lecteur d'une ambiance particulière m'intéresse. Le plus dur sans doute est de ne pas copier un style lorsque l'on écrit et qu'on lit en même temps un roman d'un auteur que l'on aime bien. Je fonctionne moi-même comme une éponge. Il m'est donc très difficile de ne pas m'inspirer d'autres auteurs. Après le tout est de trouver son style. Le mien dans « Ma Chair à Vif » était sans doute, de par la nécessité imposée par l'intrigue, plus télégraphique que des auteurs comme Harlan Coben ou Grangé.


Quels projets pour la suite ? A quand le second roman ?

    J'ai entamé l'écriture d'un second roman dont le pitch pourrait se résumer ainsi, attention c'est un scoop... « Ce n'est pas parce que l'on est mort... que l'on est plus en vie ». Mais difficile de dire quand il sortira. Parce que d'une il me faut le terminer. Et de ce côté-là je suis assez laborieux dans la mesure où je suis capable de réécrire plusieurs fois un même chapitre. Et d'autre part, il me faudra le faire publier. Et ça ce n'est jamais gagné d'avance. En tout les cas, je m'y atèle. Au mieux je pense que ça pourrait sortir fin 2010 ou début 2011.


Des conseils pour celui ou celle qui voudrait se lancer dans l'écriture ?

    Aucun conseil si ce n'est qu'il faut s'accrocher. Et accepter les refus, le temps qui passe, les échecs. Douglas Kennedy a mis six ans à écrire son premier roman (Cul de Sac). Werber a mis autant de temps je crois à faire publier les Fourmis... et il y a même le lauréat d'un Goncourt qui s'était vu refuser son manuscrit par une vingtaine de maison d'éditions... tout ça donne de l'espoir. Le rêve tient à un fil. Celui de l'abnégation et de la persévérance.


Êtes-vous un « gros » lecteur de roman ? Est-il facile quand on est écrivain de se détacher de la mécanique de narration des autres auteurs pour savourer un roman ?

    Je suis un gros lecteur de roman depuis que j'écris. Ça me sert à écrire car comme je l'ai dit plus haut je suis une vraie éponge. Moi ça me nourrit donc je ne cherche pas à m'en détacher. Juste à écrire une histoire qui me soit propre. Mais les influences pèsent c'est certain. Le seul danger au fond est de vouloir « faire aussi bien que »... car c'est là que commence la vraie prise de tête.


Vos derniers coups de cœur littéraires (tant au niveau roman, BD, cinéma, peinture...) ?

    Thilliez et "L'anneau de Moebius" est pour moi une pure merveille en terme de structure. C'est pour moi la chose la plus complexe dans l'écriture. L'architecture d'un roman, je suis donc d'autant plus bluffé lorsque celle-ci se complexifie. Côté ciné, j'ai beaucoup aimé (autant que le roman, ce qui est une performance) « Je vais bien, ne t'en fais pas ». Sinon dans un univers plus onirique j'adore Jean-Pierre Jeunet. Son univers. Ses trouvailles. Sa poésie.


Vous avez le mot de la fin.

    Merci à vous pour ces questions.

Et à bientôt j'espère en librairie... pour découvrir quel est le lien entre un avion qui s'est crashé il y a trente ans dans le sud de la France et un certain Joshua Blanc, tout juste évadé d'un hôpital psychiatrique...

 

 Du même auteur : Biographie, chronique, interview

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